Social Listenning et E-reputation par Christophe Asselin de Digimind

Social Listenning et E-reputation par Christophe Asselin de Digimind

Qu’est-ce que le métier de Chief Evangelist

Bonjour Christophe. Tout d’abord, merci d’avoir répondu présent pour cette interview ! Pouvez-vous vous présenter et présenter la société Digimind dans laquelle vous œuvrez en tant que Chief Evangelist & Content Marketing Specialist ?

Bonjour, Je suis Christophe AsselinJe travaille en effet chez Digimind en tant que « Evangeliste » et spécialiste du contenu.  Digimind est éditeur de logiciels de veille, d’écoute et analyse du web et des médias sociaux, et ce, depuis 1998. Nous bénéficions donc d’une très bonne expertise du web, bien au-delà des réseaux sociaux puisque nous savons analyser les forums, les blogs, les bases de données spécialisées, les sites d’avis consommateurs et tous les formats précurseurs du web

Côté réseaux sociaux, l’écoute concerne les plateformes leaders comme Facebook, Twitter et Instagram bien sûr, mais aussi Pinterest, Reddit, ou les réseaux sociaux locaux en Asie et Russie.

Mon rôle chez Digimind consiste à « évangéliser ». Cette fonction, venue des USA, consiste à vulgariser, expliquer, démontrer les différents apports de l’écoute, de la veille du web et des médias sociaux pour le pilotage de différentes fonctions et la prise de décision dans l’entreprise. Cette évangélisation se réalise sous forme de conférences, webinars et via de nombreuses ressources (études sectorielles, livres blancs, billets) que je conçois.

Quelle est la définition du social listenning ?

Pouvez-vous nous donner votre définition du social listening ?

Le social listening consiste à écouter et analyser tout ce qui peut être dit sur une entreprise, un dirigeant, une marque sur les médias sociaux et les espaces de discussions du web. Il s’agit de capter tous les articles et messages des journalistes, consommateurs, clients, prospects et de les analyser pour aider ensuite le marketing, la communication, les RP (les relations presse), le service de relation client notamment à prendre des décisions mieux renseignées et à piloter leur activité en connaissant parfaitement leur environnement et les enjeux.

Par exemple, en Asie, nous captons, analysons et qualifions toutes les conversations des consommateurs des smartphones ASUS afin de mieux comprendre leurs attentes, goûts et souhaits d’amélioration. La marque les prend ensuite en compte pour la R&D, les campagnes de communication, pour les fonctionnalités importantes aux yeux du public qui peuvent être spécifiques dans les différents pays d’Asie.

Le Social Listening doit capter aussi bien le earned media (conversations des internautes et médias), que le owned media (messages des marques sur leur propres comptes social media).  Nous intégrons aussi la réputation issue des moteurs de recherche comme Google, très visible, à travers les suggestions proposées lorsque le consommateur tape une marque ou un produit.

Les applications du social listening sont nombreuses puisque ces plateformes sont utilisées pour les problématiques de protection de la marque (e-réputation, gestion de crise), insights consommateurs, veille concurrentielle, détection des tendances (technologiques, culturelles, de consommation), l’analyse des campagnes ou encore l’identification d’influenceurs et leaders d’opinion.

Le social listenning est-il fait pour tout le monde

Selon vous, est-ce que tout le monde devrait être à l’écoute des signaux sur le web et les réseaux sociaux ou existe-il des secteurs d’activités plus “sensibles” que d’autres? Et pourquoi ?

Oui, l’écoute du web et des réseaux sociaux concernent toutes les organisations. On pourrait penser qu’elle intéresse majoritairement le BtoC mais les problématiques BtoB sont très largement présentes tant les informations postées en ligne sont nombreuses. Ainsi, même un utilisateur de tramway ou de bus va poster des commentaires sur le confort ou les performances du matériel, du réseau. Ce n’est pas l’acheteur du produit, mais, en tant qu’utilisateur final, son ressenti va peser de plus en plus.

Bien sûr, il existe des secteurs plus sensibles que d’autres pour lesquelles l’écoute est primordiale. D’abord, les secteurs hyper concurrentiels comme celui des opérateurs télécoms par exemple ou la guerre technologique et marketing fait rage et pour lesquelles la rétention de l’abonné est cruciale ; des secteurs comme l’industrie pharmaceutique, avec des enjeux de R&D, de FUSAC, de voix du patient et réglementaires très importants. Il y aussi des secteurs particulièrement sujet à des crises, qu’elles soient nées sur le web ou dans la vie réelle : toujours l’industrie pharma (ex : Levothyrox); l’agro-alimentaire (viande, lait) et bien sûr la grand distribution, point de convergence des fournisseurs et des préoccupations de très nombreux consommateurs. Le retail en général est aussi très exposé : des marques comme H&M sont souvent touchées par des bad buzz, leur audience étant mondiale, plutôt jeune et les produits très régulièrement renouvelés, multipliant les commentaires à chaque nouvelle collection.

Il convient aussi de citer des entreprises comme United Airlines, qui, depuis plusieurs années, cumulent les buzz voire les crises, tant les maladresses sont nombreuses. Très souvent, le problème de réputation provient d’un manque de sensibilisation du personnel aux DO’s et DON’T par rapport à un potentiel partage de leurs « mauvaises » pratiques sur les réseaux sociaux.

Des exemples de badbuzz

Avez-vous l’exemple d’une société qui a évité un bad buzz ou développé son activité grâce à une écoute attentive du web et des réseaux sociaux ?

Je ne peux pas citer les noms car les entreprises préfèrent rester discrètes mais nous travaillons par exemple pour des acteurs de la grande distribution, pour lesquels le travail de gestion de crise consiste à désamorcer presque toute les semaines, une crise potentielle compte tenu de signalements et plaintes sur les réseaux sociaux à propos de produits défectueux, mal conservés ou comportant des « corps étrangers ». Il s’agit de communiquer l’alerte le plus rapidement possible à l’interlocuteur adéquat après toutefois avoir cherché à localiser et à qualifier le plus précisément possible la plainte. C’est un travail par nature moins spectaculaire que les crises dont on parle beaucoup mais c’est la réalité quotidienne.

Plus visible, on peut estimer qu’une crise comme celle de Décathlon (Hijab) en février a été bien gérée. Même si le volume de messages relatifs a été assez important (826 124 tweets sur 4 jours), la communication et le community management de la marque très orientées sur la réponse individuelle, le dialogue et l’explication, notamment sur Twitter, ont été remarquables pour apaiser les esprits, bien au-delà d’un simple communiqué de presse. Le social listening sert aussi à cela : écouter, et comprendre, au fil des mois et des années, les mécanismes, évolutions et réactions de vos communautés à propos de votre marque et donc les risques.

Pour éviter le bad buzz avant qu’il ne commence, la rédaction vous conseille un articles qui recense les étapes pour gérer son e-réputation au niveau personnel et au niveau de votre entreprise.

Les grandes tendances du social listenning et e-réputation

Quelles sont les grandes tendances qui se dessinent aujourd’hui dans les domaines du social listenning, de l’e-reputation ?

D’abord, la prise en compte des spécificités régionales. On a l’habitude de dire qu’il y 2 internets, un américain, un chinois mais les facettes locales de réseaux sociaux sont plus complexes et multiples. Par exemple, en Russie, il faudra intégrer VKontakte, le Facebook régional, en Allemagne Xing, le Linkedin local. L’Asie a évidement ses propres réseaux sociaux, très différents des médias sociaux utilisés par les européens et américains. Et il faudra considérer chaque pays de ce continent en particulier pour bien déceler les réseaux majeurs à écouter (Weibo pour la Chine ou Naver, réseau majeur en Corée par exemple).

L’intégration du machine learning. Je ne parlerai pas d’IA, terme trop galvaudé à mon goût mais de l’une de ses composantes concrètes : l’apprentissage de la machine en fonction des pratiques des utilisateurs des outils de social listening. Par exemple, on peut augmenter fortement la pertinence de l’analyse des sentiments exprimés sur les réseaux sociaux (positif, négatif, neutre, mitigé) en faisant apprendre constamment à la machine de la qualification humaine de centaines de messages pour parvenir à un taux de pertinence de 95% et mieux, à une analyse fine par nuances de sentiments (colère, adhésion, joie, rejet, excitation), essentielle pour bien tirer parti des insights consommateurs

Des outils user friendly et modulables. Avec l’écoute des médias sociaux, nous ne sommes pas dans l’univers de la veille stratégique où des spécialistes de l’information dédiés à ces tâches peuvent utiliser des outils parfois complexes. Les outils de social media listening destinés à des marketeurs et communicants doivent être aussi faciles à utiliser que Facebook et surtout « malléables » avec une facilité de paramétrage de l’utilisateur final qui pourra construire ses propres surveillances de mots clés et ses tableaux de bord de manière parfaitement autonome et sans rentrer dans un obscur back office.

La data visualisation sur mesure. C’est une conséquence du point précédent : nous fournissons de plus en plus de dataviz, ces interfaces visuelles d’aide à l’analyse qui permettent de cerner en un coup d’œil l’information sensible, l’évolution d’un buzz, un nouvel influenceur ou une suggestion Google liée à votre marque : ces beaux outils n’ont de sens que si l’utilisateur final peut les paramétrer lui-même, pour l’adapter à ses besoins qui évoluent en permanence, en toute transparence. Vous voulez passer d’une visualisation des micro- influenceurs Twitter en fast fashion aux macro-influenceurs Instagram en slow fashion ? Le choix et le paramétrage doivent pouvoir s’opérer en quelques clics, simplement et rapidement !

Des conseils d’expert pour soigner son e-réputation ?

Et pour finir, quel serait votre ou vos conseils pour les lecteurs de Social Media For You pour protéger leur e-réputation ?

Le sujet est vaste : je retiendrai 4 points importants parmi de nombreux conseils possibles :

  • Commencez par un audit de réputation pour bien comprendre sur quels réseaux sociaux ou espaces se situent les enjeux pour votre marque. Si vous êtes dans le secteur de la santé, de nombreuses conversations auront lieu sur les forums, moins sur Facebook ou Twitter.
  • Surveillez large : avec votre outil de social listening, allez au-delà de la surveillance de votre marque et pensez aussi à vos dirigeants, vos concurrents et à votre secteur en général pour anticiper au mieux des crises potentielles : le diesel gate a commencé par toucher Volkswagen, mais, du fait de la structure du marché des constructeurs automobiles, s’est étendu à de nombreuses marques ! Une cartographie des parties prenantes potentielles vous aidera dans cette étape.
  • Ne surréagissez pas : Tout buzz n’est pas crise et ne nécessite pas de grandes réactions. A force d’écoute et d’analyse, le choix de nombreuses marques est de garder le silence le plus longtemps possible afin de ne pas créer d’effet boule de neige.
  • Privilégiez l’humain : oui, vous avez la chance de posséder un magnifique outil de social listening. Mais sans une bonne gestion de l’humain, ses bénéfices seront souvent limités. Pensez donc à constituer une équipe pluridisciplinaire pour l’analyse ou au moins  destinataire des tableaux de bords et rapports social media (digital, support client, juridique, produit…) qui pourra prendre du recul sur un évènement selon différents regards. Ajoutez à cela une formation et sensibilisation des personnes du « terrain » qui constituent la pierre angulaire de la réputation d’une entreprise et ses premiers ambassadeurs : personnes en agence, magasin, boutique et tous les collaborateurs d’un circuit de distribution, en contact direct avec le public

Merci Christophe Asselin pour vos réponses riches en enseignements pour toute la communauté et les lecteurs de SMFY !

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